Dans une lettre adressée le 17 décembre aux Commissaires européens, Mme Albuquerque et M. Dombrovskis, quatre ministres fédéraux allemands ont demandé le report de deux ans de la mise en œuvre de la directive CSRD.
15 pays n’ont, à ce jour, toujours pas transposé cette directive dans leur droit national malgré la date butoir du 6 juillet 2024. Certains pays membres de l’UE sont entrés en procédure d’infraction. C’est dire l’appétence que suscite cette déferlante bureaucratique.
La France a fait le choix, zélé, d’être le premier pays à transposer cette directive, en y ajoutant des sanctions pénales et des obligations qui débordent très largement le cadre fixé par l’Union Européenne.
Depuis 2021, le METI n’a eu de cesse que d’alerter les puissances publiques française et européenne sur l’impact de cette directive sur les entreprises – spécialement sur les ETI. Directive dont les modalités de mise en œuvre ont été mal calibrées par les experts mandatés et les conséquences financières mal évaluées.
Depuis quelques années, nos appels ont été entendus : par le Président de la République, qui en mai 2023, appelait à « une pause réglementaire » sur les normes environnementales, et plus récemment par le Premier ministre Michel Barnier qui avait lancé d’importants travaux, en France comme auprès de la Commission, pour mettre en œuvre un « moratoire normatif ».
La décarbonation de l’appareil industriel des ETI, largement engagée par 86% d’entre elles, implique 26 Mds€ d’investissements supplémentaires par an d’ici 2030 (soit le doublement des CAPEX annuels). Les coûts associés, pour les ETI françaises, du reporting lié à CSRD s’élève à près de 4 Mds€ sur deux ans soit près de 13% de leurs investissements. Souhaite-t-on des projets qui contribuent à décarboner notre économie ?
Souhaite-t-on des coûts supplémentaires qui grèvent la compétitivité pour assurer un reporting disproportionné ?
Alors que le décrochage économique européen s’amplifie avec les autres zones géographiques, que la conjoncture industrielle européenne, lourdement déprimée, menace nos usines et des milliers d’emplois, alors que la concurrence mondiale est plus féroce que jamais, la position allemande relève du strict bon sens économique. Elle relève également d’une grande responsabilité pour préserver le tissu industriel de l’Europe à commencer par les entreprises du Mittelstand qui sont le ciment de l’économie européenne, le cœur de nos chaînes économiques, et notre puissance à l’export.
En France, le troisième trimestre marque une réduction de près de -70% des investissements des ETI du secteur manufacturier par rapport au trimestre précédent. Les créations d’emplois des ETI, habituellement résilientes, ont été divisées par deux depuis le printemps 2024. Les défaillances ont été multipliées par deux.
Dans un pays aux marges manœuvre budgétaires inexistantes, la simplification est la clé, le METI appelle donc le Premier ministre et son futur Gouvernement à soutenir officiellement le report de CSRD alors que l’Allemagne en fait également formellement la demande.