[La Tribune] Appel des ETI pour un grand débat sur le « travailler et produire en France »

LETTRE OUVERTE. Dans le prolongement de l’allocution du président de la République, lundi soir, plusieurs dizaines de dirigeants d’entreprises des territoires ont pris l’initiative de cette lettre ouverte pour répondre à l’appel solennel qu’il a lancé et prendre les responsabilités qu’exigent les circonstances. Les dirigeants d’ETI prendront leur part, tant dans l’urgence que dans le débat de fond qui s’annonce.

 

UNIS POUR SAUVER LES TERRITOIRES

Le 11 décembre 2018

Monsieur le Président de la République,

Nous sommes les entreprises des territoires. Nos sièges sociaux sont installés, pour certains depuis plusieurs générations, dans les villes moyennes. Nos usines sont souvent les derniers actifs des zones rurales. Nous suscitons l’activité de milliers d’entreprises prestataires de services, sous-traitants ou fournisseurs… Nos entreprises à taille humaine continuent d’embaucher et d’investir même par gros temps et servent d’airbag en période de crise. Avec nos salariés, nous sommes fiers d’animer le tissu économique des régions. Mais pour combien de temps encore ? Car voilà : nos PME et nos ETI sont trop peu nombreuses et trop petites pour assurer à elles seules la revitalisation de nos régions.

Gouvernements après gouvernements, quinquennats après quinquennats, nous n’avons cessé d’interpeller les décideurs sur les conséquences de long terme de politiques qui, par faiblesse ou pour des raisons comptables, jouent contre le camp de la France. Dans notre pays, la moitié de la richesse produite se transforme en impôt. Cette fiscalité record pèse sur tous, les particuliers comme les entreprises qui ont fait le choix de produire et d’employer en France. Ces entreprises-là, pourtant « citoyennes», payent en moyenne 50% de plus d’impôts et de charges que dans les autres pays européens. Cette situation a accéléré la désindustrialisation, nous a fait perdre de nombreux savoir-faire, rayé de la carte des centaines d’usines, mis au chômage des milliers de salariés et provoqué l’affaiblissement économique et le déclassement social. C’est ce cri de détresse qui s’exprime aujourd’hui. Il vient du cœur des territoires.

Monsieur le Président de la République, vous avez décrété l’état d’urgence économique et sociale et annoncé des mesures immédiates pour les salariés. Nos entreprises y prendront leur part. Il serait possible d’aller plus loin, notamment sur le forfait social, qui grève l’épargne salariale et sur les avantages en nature à nos salariés, malheureusement de plus en plus contraints alors qu’ils participent au lien social. Ces deux mesures simples auront un effet instantané sur le pouvoir d’achat.

Au-delà, le grand débat que vous avez lancé doit impérativement porter sur « le travailler et le produire en France ». Car c’est de cela qu’il s’agit. Dans les territoires souvent abandonnés par les services publics, ce sont nos entreprises qui font l’emploi et le pouvoir d’achat. Ce sont nos entreprises, de la plus petite à la plus importante, qui doivent être encouragées à se créer et à se développer dans nos départements, nos cantons. Le retour de la prospérité est le meilleur garant de la solidarité.

Il n’y aura pas de prospérité si on continue d’opposer les uns aux autres. C’est un sport national dont les Français sortent toujours perdants. Il faut unir et rassembler. Unir les régions et les entreprises, autour des enjeux de l’emploi, de la formation professionnelle, de l’apprentissage ou du mécénat territorial. Unir les entreprises et les salariés, dans un dialogue direct sur l’organisation, le coût et la rémunération du travail. Le Nouveau Contrat pour la Nation devra partir du terrain. Le défi est immense et mérite l’union nationale.

La situation actuelle, si elle perdure, risque d’accentuer la détresse et le déclassement. Si nous n’agissons pas vite, c’est toute la France qui va devenir périphérique. Alors que notre pays a tous les atouts et les talents pour se redresser au bénéfice de tous.

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LES SIGNATAIRES

  • Frédéric COIRIER, GROUPE POUJOULAT
  • Luc DARBONNE, DAREGAL
  • Nicolas JACQUET, ADVENIS PROPERTY MANAGEMENT
  • Jean-Marie NUSSE, EXACOMPTA CLAIREFONTAINE
  • Philippe d’ORNANO, SISLEY
  • Emmanuèle PERRON, NGE
  • Charles ROBINET-DUFFO, HENNER
  • Arnaud VAISSIÉ, INTERNATIONAL SOS
  • Sylvie GRANDJEAN, REDEX GROUP
  • Pierre-Olivier BRIAL, MANUTAN
  • Elizabeth DUCOTTET, THUASNE
  • Jacques FRENEHARD, GROUPE FRENEHARD et MICHAUX
  • Olivier SCHILLER, SEPTODONT
  • Gilles TERZAKOU, MRS
  • Emmanuel VIELLARD, LISI GROUP
  • François ASSELIN, ASSELIN
  • Jean Thomas SCHMITT, HEPPNER
  • Thibaut HYVERNAT, STERIMED
  • Christian LAINÉ, GROUPE RIVADIS
  • Henri NIGAY, NIGAY
  • Christian DEWAVRIN, DEWAVRIN
  • Jacques BRAUN, GROUPE WATERAIR
  • Emmanuel VASSENEIX, LSDH
  • Stéphane REGNAULT, VYGON
  • Eric BOUVIER, STRAND
  • Olivier COURTIN, GROUPE CLARINS
  • Bruno BOCCARD, BOCCARD
  • Daniel-L. MATTHEY, MAGAFOR
  • Didier MARTIN, EUGENE PERMA
  • Georges LINGENHELD, GROUPE LINGENHELD
  • Thibault DURIEU, GROUPE DURIEU
  • Jean-Michel TIVOLY, TIVOLY
  • Jean-Louis PECH, ACTIA GROUP
  • Jérôme SAUER, KS CONSTRUCTION
  • Arnaud GOBET, INNOTHERA
  • Laurent BATAILLE, POCLAIN HYDRAULICS
  • Franck MATHIS, MATHIS
  • Claude FAURE, FM GROUP
  • Pierre-Etienne, BINDSCHEDLER, SOPREMA
  • Christian PONTICELLI, PONTICELLI FRERES
  • Geoffroy ROEDERER, GROUPE ROEDERER
  • Philippe GRODNER, SIMONE PERELE

A elles seules, ces entreprises représentent près de 15 milliards d’euros de chiffre d’affaires et plus de 78.000 salariés.

Publie par La Tribune le 12 décembre 2018